Oui, c’est encore quelque chose qui est extrêmement présent. L’idée de ce livre est née à l’automne 2020. Ce sont les éditions Le Coudrier qui m’ont contactée. Ils m’ont expliqué que, malgré la crise Covid, les gens ne comprenaient pas vraiment comment bien éviter les infections et m’ont proposé de faire un livre sur l’hygiène des mains, et en en discutant, on a estimé que c’était trop réducteur. Parce qu’on s’est aperçu que malgré l’abondance des messages, la plupart du grand public et des professionnels de santé n’avaient pas une bonne connaissance des modes de transmission et qu’il y avait besoin d’une mise à plat. C’est pour cela que ce livre donne des clés pour comprendre comment éviter de se contaminer et de contaminer les autres. Il y a deux ans, nous avons été confrontés à un coronavirus, mais le jour où on sera confronté à des bactéries tellement résistantes qu’on n’aura plus de traitement, la seule façon de s’en protéger seront les mesures de prévention des infections.
Ce livre est à destination des professionnels de santé, qu’ils soient seniors ou juniors et il est étayé par des exemples pratiques. Il peut servir à des enseignants en santé, à un manager, un chef de service qui a envie de mieux comprendre comment ça fonctionne. Cela étant dit, il est aussi accessible au grand public.
Ah non, surtout pas. Ce ne sont ni des recommandations, ni des affirmations. C’est une approche différente. Mon objectif, c’était de faire quelque chose qui ne soit pas rébarbatif, tout au contraire ; de faire du pratico-pratique pour le professionnel. L’idée, c’est de lui donner des clés pour qu’il arrive, dans sa pratique, à identifier les situations les plus à risque et qu’il sache quoi faire. L’organisation du livre est faite pour lui apporter des connaissances de départ, les bases scientifiques : c’est quoi une bactérie, un virus, un réservoir, quels sont les modes de transmission… Et pour que ça ne soit pas rébarbatif, j’avais envie de mettre un petit côté historique à chaque fois. Au début de chaque chapitre, il y a une contextualisation qui traite de l’histoire médicale des soins et de l’innovation scientifique.
Oui, il va balayer tout ce qui peut être fait pour éviter de se contaminer, ce qui va passer par l’hygiène des mains, les équipements de protection et faire le point sur les antiseptiques, l’entretien de son matériel et des surfaces afin de faire en sorte que son environnement de soin ne devienne pas une zone de niche microbienne ou de contamination. Quant au dernier chapitre, il donne des pistes au professionnel pour qu’il réfléchisse sur sa pratique et puisse s’autoévaluer. J’informe aussi sur les personnes recours que l’on peut contacter car c’est très peu connu. Ces professionnels sont là pour aider les soignants. Dans les EHPAD, il existe des équipes mobiles d’hygiène avec un médical et un paramédical qui peuvent les conseiller ; dans un établissement de santé il y a l’équipe de prévention des infections et, quand on est en libéral, on peut faire appel au CPias**, il existe aussi des sites internet avec des forums spécialisés.
La survenue d’une infection est multifactorielle. L’infection dépend de la susceptibilité propre du patient et de l’inoculum. Avant l’infection par un micro-organisme, il y a la colonisation et encore avant la contamination. Ce dernier peut être déjà présent chez le patient ou transmis à partir d’un autre patient. Les portes d’entrée sont nos muqueuses (nez, yeux, bouche ou toute effraction cutanée) et la transmission peut être directe ou indirecte (mains, matériel, environnement). On peut les prévenir en étant vigilant sur les facteurs de risque des patients et en ayant des réflexes clés dans sa pratique pour se protéger et protéger les autres. Si je reprends l’exemple de l’hygiène des mains, selon les résultats nationaux, on en est à moins de 80% de friction avant de toucher son patient, ce qui offre une sérieuse marge de progression.
Oui, pour l’instant ils sont tous positifs et j’en suis vraiment très heureuse. Les personnes qui évoluent dans mon milieu de la prévention des infections sont enthousiastes. Ils me disent qu’ils utilisent eux-mêmes le livre et le recommandent pour des formations. J’ai aussi eu des retours d’enseignants en instituts de formation en soins infirmiers, d’infirmiers en libéral et de médecins libéraux. Ils l’ont trouvé agréable à lire, et permettant une réflexion positive, ce qui est un bon point parce qu’on n’était pas certain au sortir de la crise Covid, que les gens aient encore envie d’entendre parler de contamination.
* Eviter les contaminations lors des soins, Ed Le Coudrier, 12 euros** Centre d’appui pour la Prévention des Infections Associées aux Soins
Pascale Gayrard, médecin spécialisé en santé publique, directrice des Éditions Le Coudrier « J’ai crée les Éditions Le Coudrier en 2010 dans l’objectif de réaliser des ouvrages concrets et pratiques à l’intention des acteurs de santé, sur des sujets pour lesquels les savoir-faire sont peu diffusés. J’ai contacté Anne-Gaeëlle Venier pendant l’épidémie de Covid-19. Elle avait fait une vidéo simple et pédagogique concernant le lavage des mains, qui donnait vraiment envie d’adopter sa gestuelle, et cela m’a donné l’idée de travailler avec elle. » |
Propos recueillis par François PettyCrédits photos : DR