La levée des mesures de distanciation sociale a permis d’améliorer les ressentis des Français concernant le manque de compagnie des autres, mais n’a pas fait disparaitre la solitude chronique.
Selon un sondage IFOP-Astrée réalisé fin 2021, la solitude est plus répandue
- parmi les moins de 25 ans (28%), décroit de façon linéaire avec l’âge (passant de 28% à seulement 9% chez les 75 ans et plus).
- chez les célibataires (33%) et les foyers constitués d’une seule personne (31%) sont aussi plus touchés.
- auprès des personnes personnes pratiquant le télétravail, 34% des sondés télétravaillant au moins trois jours dans la semaine se sentent toujours ou souvent seuls (+ 15 points par rapport à l’ensemble de la population française). En outre, 45% de ce public a fait l’expérience des pensées suicidaires au cours de la vie.
- parmi les publics confrontés à des difficultés économiques comme les chercheurs d’emploi.
Il existe des situations plus propices au sentiment de solitude comme :
- les accidents de la vie (divorce, deuil, chômage, etc.)
- les déménagements,
- le harcèlement à l’école,
- l’immigration,
- le handicap,
- la sortie de prison.
Certains comportements comme l’utilisation excessive des réseaux sociaux peuvent aussi générer une baisse des interactions sociales de visu. De même l’illectronisme, qui est l’inaptitude d'un individu à utiliser les outils numériques du quotidien, exclu toujours plus.
Les personnes isolées présentent également un faible accès à des activités récréatives comme la culture et les vacances.
Les marqueurs de la solitude
- La solitude entraine une moindre activité, avec un désinvestissement à la fois sur le plan physique, mental et social,
- En l’absence d’un entourage capable d’écoute et de soutien face aux problèmes de la vie, les émotions et les pensées négatives ont plus d’impacts,
- Une hausse des protéines C-réactive (CRP),
- Une pression artérielle plus élevée.
Une étude du centre de cardiologie de l’université de Copenhague a montré que les personnes ayant été hospitalisées pour des problèmes cardiaques ont plus de risque de mourir dans les mois qui suivent si elles sont seules. L’étude a été réalisée sur 13 000 personnes âgées de 65 ans en moyenne. La probabilité des hommes qui vivent seuls de mourir est deux fois plus élevée que les autres dans l’année qui suit leur hospitalisation.
Les solutions
Le médecin traitant peut avoir un premier rôle afin d’évaluer le problème et de faire un diagnostic. Il peut orienter le patient vers les bonnes ressources pour rompre l’isolement.
Outre des actions permettant de compenser les obstacles - difficultés à accéder aux droits, aux infrastructures et services publics, aux lieux de loisir et de sociabilité -, la Fondation de France met en évidence des actions à renforcer ou à initier.
Selon elle, un rapprochement entre les acteurs médicaux, les travailleurs sociaux et les acteurs du maintien dans l’emploi permettrait une meilleure adéquation de l’accompagnement et des solutions proposées aux besoins des personnes.
- Plus qu’un accompagnement, une médiation qui « va vers », crée une passerelle entre les personnes isolées et les lieux de sociabilité est nécessaire,
- Le développement d’espaces de parole via les réseaux sociaux ou en face à face constitue sans doute une mesure propre à rompre la solitude de certains.
Dans un autre registre, un accompagnement à domicile après hospitalisation constitue aussi une initiative pertinente: l’association Astrée, qui mobilise près de 800 bénévoles, facilite le retour à la vie quotidienne de personnes fragilisées par leur état de santé et leur contexte de vie.
L’ergothérapeute peut aussi offrir un soutien émotionnel et apporter des outils pour permettre au patient la restauration d’un réseau relationnel et reprendre un mode de vie plus sain (sommeil, alimentation, activité physique).
La solitude reste taboue. L’une des difficultés est de repérer les personnes seules, pour faire face à cela des initiatives comme celle de la ville de Pau et de son plan anti-solitude sont mises en place.
Bien être et vie sociale imbriqués depuis toujours
A l’opposé, on sait que certains espaces facilitent la solidarité comme les îles et les milieux hostiles, en raison des liens sociaux uniques nécessaires pour y survivre. Par ailleurs, une étude du Harvard Study of Adult Development a été inaugurée à Boston en 1938 auprès de 700 hommes, dont des étudiants de leur campus, tentant de déterminer quels facteurs ont joué un rôle important dans leur développement.
Plusieurs cohortes ont été suivies et élargies au fil du temps jusqu’à aujourd’hui couvrant plusieurs générations. Il en ressort une corrélation selon laquelle l’une des clés du bonheur serait de nourrir de « bonnes relations », des liens de qualité avec des proches et non des liens en termes quantitatifs.
Ainsi, selon ses auteurs « les connexions sociales sont vraiment très bénéfiques pour nous et la solitude tue. Les gens qui sont les plus connectés à leur famille, à leurs amis, à leur communauté, sont plus heureux, physiquement en meilleure santé et ils vivent plus longtemps que les gens moins bien connectés. Et, à 80 ans, ceux qui savent qu’ils peuvent encore compter sur des proches en cas de coups durs, affichent aussi une meilleure mémoire ».